Qui est patriote ?
Commémoration des 80 ans de la Résistance française
Le 14 juillet, l’association Artémis nous invitait à commémorer les 80 ans de l’opération Cadillac à Pleaux dans le Cantal. Pour l’occasion, Télé Millevaches s’est interrogée sur la question du patriotisme. En 1944, l’opération militaire d’envergure consiste à larguer des armes, des médicaments et des vivres pour renforcer la puissance matérielle des résistants. Ces derniers appuient la contre-offensive des Alliés contre l’Allemagne nazie.
Depuis les dernières élections européennes, Jordan Bardella, président du Rassemblement national, a pris la tête du groupe « Patriotes pour l’Europe » au Parlement européen. Une formation politique qui assume des liens étroits avec le belligérant Vladimir Poutine. En ces temps troublés et inquiétants, il nous semblait important d’interroger à nouveau cette notion de patriotisme. D’autant plus lors d’un événement qui célèbre la résistance française contre l’occupant allemand.
« On est d’ici, les gens d’ici c’est ça, ils veulent sauvegarder leur coin, leur région » explique simplement un ancien, décoré de médailles. « Nous, on se revendique françaises, patriotes et universalistes, ajoutent fièrement deux femmes habillées en costumes d’époques, drapeau tricolore en main. Ce drapeau ne doit pas être récupéré par un parti d’extrême-droite » concluent-elles sous les applaudissements des passants.
Fabien Tillon, auteur d’une biographie sur son grand-père Charles Tillon, résistant communiste, fondateur des Francs-tireurs et partisans, ministre du gouvernement provisoire de 1944 à 1946, et fidèle ami de Georges Guingouin, nous apporte son analyse. « Charles Tillon revendiquait le terme de patriote, insiste-il. Les vichystes, bien que se revendiquant eux-mêmes patriotes étaient en réalité des traîtres de la Nation. Ils ont collaboré avec les ennemis allemands, italiens et japonais. Aujourd’hui, les gens du RN se disent patriotes mais défendent en réalité la France d’un monde ancien » conclut-il.
Pour en savoir plus sur l’extrême-droite en Limousin :
40 % de votes extrême droite à Oradour-sur-Glane05'09''
Le matin du 10 juin, les résultats des élections européennes sont communiqués pour chaque commune par voie de presse. Un chiffre choque plus que les autres : la commune d’Oradour-sur-Glane, lieu symbolique des atrocités commises par les troupes nazies en 1944, a voté à plus de 40 % pour l’ensemble des partis d’extrême droite.
Coïncidence, le jour de ce résultat avait lieu la commémoration des 80 ans du massacre perpétré par la division SS Das Reich en présence du président français Emmanuel Macron et de son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier.
Télé Millevaches a passé la journée sur place, en essayant d’obtenir quelques mots de la part des personnes venues pour les commémorations, mais aussi de la part de quelques habitants du bourg. « J’ai failli démissionner hier soir, j’ai honte » nous dira en pleurant un élu d’une autre commune et porte drapeau de la Brigade RAC. « C’est contradictoire, car ce sont les mêmes idées politiques que les gens qui ont commandé ce massacre » diront des enfants venus de Saint-Junien. « Vous avez la vieille ville et tout ce qui s’est construit en périphérie, avec des apports de populations nouvelles qui n’ont pas forcément le recul sur les faits qui se sont déroulés ici il y a 80 ans. » ajoutera Guillaume Guérin, président LR de l’agglomération de Limoges. Un ressortissant allemand invité pour l’occasion s’étonnera : « C’est surprenant un tel score dans un endroit comme celui-ci », de même qu’un habitant d’Oradour croisé au café du coin : « C’est bizarre qu’à Oradour il y ait eu autant de votes pour l’extrême droite. En même temps, chacun vote comme il veut ».
« En 1830, l’Algérie n’existait pas »05'00''
Zlabia, mouna, coca : autant de plats illustrés dans un couloir de la Bibliothèque francophone multimédia (Bfm) de Limoges. Du 16 mars au 13 avril derniers, l’institution accueillait « La cuisine des Pieds-Noirs, une histoire de soleil et de mer héritée des gens d’Algérie », exposition nostalgique d’une époque où l’Algérie faisait partie de l’Empire colonial français.
Cette carte blanche donnée au Cercle algérianiste du Limousin n’a suscité dans la presse locale qu’une couverture convenue. Ses dirigeants Sandrine Morales et Patrick Graf déclarent y mettre en valeur la culture pied-noire sans adjoindre de caractère politique ou de débat historique. « En chaque Pied-Noir, il y a quelque chose qui s’est éteint. Si on peut rallumer une petite flamme avec le Cercle algérianiste, c’est une grande victoire. »
Pourtant, l’élu d’opposition Gilbert Bernard souligne la « réécriture de l’histoire » voire le « révisionnisme » de l’association fondée à Perpignan et qui célèbre son congrès annuel à Béziers : deux villes où le Rassemblement national est au pouvoir. M. Bernard s’est opposé au soutien financier accordé par la mairie de Limoges à l’antenne locale du Cercle. Pierre, usager de la Bfm, considère qu’en omettant la guerre et la spoliation coloniale avec des images de peuples vivant en harmonie, l’exposition contribue au « racisme d’ambiance » qui infuse en France.
L’accueil d’une telle exposition interroge plus largement sur les sympathies de la majorité municipale avec l’extrême-droite, selon Gilbert Bernard.
Références
Fiche technique
Titre : Qui est patriote ?
Durée : 05'18''
Date de production : août 2024
Format : 4
Production et distribution : Télé Millevaches
Réalisation : 286449
Droits : 1
Rushes conservés : 1
Photos du tournage : 0